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30.11.11

Aléatair


Je viens d'atterrir où je ne m'y attendais pas. J'ai décollé parce que je le sais juste assez un peu pourquoi. Ça coûte cher tous ces voyages. Toutes ces destinations, j'ai toujours de la misère à savoir si elles sont nouvelles. Les endroits, ils changent, ils virent à l'envers, ils explosent, ils implosent, ils se colorent, ils fondent, ils s'égrainent.
Ce qui reste toujours pareil, c'est l'entière et inévitable consécration de tout mon esprit à ces vacances. Elles me tiennent plus occupé que n'importe quoi d'autre.
Je n'aime pas les vacances. Je voudrais rester avec les gens qui prennent leurs occupations à la légère. Ceux qui n'ont pas besoin de partir, ceux que je quitte trop souvent. Ceux qui n'ont jamais mal au coeur à force de prendre toutes sortes de moyens de transport. Ceux qui quelquefois vont partir, mais qui en reviennent éduqués, ceux qui en profite.
Car je n'en tire rien. Vraisemblablement. J'y retourne toujours, il me semble. Il en vient que je distingue mal mes congés et ma routine. Mes embarquements sont rendus trop subtils, je n'ai même plus besoin de faire attention à la marche... Je connais ces escaliers autant que ceux de ma maison maternelle, lesquels je monte et descends dans le noir et sans aucun souci. À moitié endormi, à moitié engourdi.
Aucun agent de bord n'est là pour veiller sur moi, je suis un habitué, on me reconnait. J'ai l'air à l'aise dans les airs. Mais ce n'est que parce que je suis trop haut et que personne n'a envie ou voit l'utilité de traîner sa longue-vue afin de voir mon visage en route vers mes vacances. On ne part pas contre son gré, qu'ils croient.
Je t'en achèterai des jumelles, tu verras, que je veux des boulets à mes pieds. Même si j'ai l'air d'un voyageur, même si j'ai l'air chez moi, si j'ai l'air comme mon chez-soi, même si mon air est vide et froid.

16.11.11

Difficiles Coïncidences.


C'est une question de chance à laquelle j'aimerais que tu répondes. Il te sera par contre impossible de me donner cette réponse à laquelle je ne m'attends jamais.

Ce n'est pas qu'elle est si difficile. Je crois d'ailleurs que c'est une d'elles qui nous passent par la tête trop légèrement, sans assez d'énervement influant sur nos neurones afin de les mettre sur papier. Une d'elles qui, du bout de notre langue, sont trop loin pour nous faire ravaler nos paroles. Ces idées oubliées involontairement ou non qui nous fâchent d'être nées ou omises. Ces brèves pulsions qui émanent une grande chaleur éphémère pouvant également être de si infimes traces d'inconscience perpétuelles et frisquettes.

Ce n'est pas qu'elle est si difficile. Ce n'est plutôt qu'une affaire de circonstances.

Que pour exister et par le fait même être franchement énoncée, les innombrables spatiaux doivent s'adonner aux infinis temporels. Que dans un contexte issu de ces facteurs, des choses aussi banales que des conventions sociales soient respectées avec attention ou totalement bafouées d'une telle manière appropriée. Et qu'à travers tous ces agencements mécaniques devront maintenant se lier des fragiles états d'âme par leur compatibilité ou mieux encore par ce qui les distingue.

Comprendre qu'il est cependant pénible de réfléchir avec l'ouverture d'esprit emmitouflée dans un confort assuré. Avouer qu'une erreur est plus facile à accepter qu'une vérité impossible. S'empêcher de se poser ces questions si tellement autant impertinentes. C'est ça, qui est réellement difficile.

13.11.11

perdre connaissance


Il y a un conflit cognitif qui n'est plus négligeable. Il y a une distance maintenant trop considérable et je suis essoufflé. J'ai tellement cogné à ma porte que j'en saigne. Je n'ai plus de souffle et je me vide de mon sang. Je perds connaissance. J'ai les genoux qui flanchent. Mon sol est instable, le ciel ne lui est plus parallèle.
Je suis en plein milieu de la balance, mais je reste constamment sans équilibre. 

Je m'accroche à ce qui me glisse imperceptiblement des doigts. On me sert la main, ça ne suffit. Elle seule ne sait comment réagir. Doit-elle rattraper ce qui s'échappe ou saisir ce qui semble plus léger? Ma main ne voit rien, ne devine pas. Elle pèse ce qu'elle tient et compare tout ce qu'elle a déjà connu. 

À quel point l'effort devient-il affliction? Comment sagement reconnaître qu'une régression est irrécupérable? Un défaitiste orage se déferle sur moi.  Des chocs intermittents me paralysent, me font tomber à genoux. Et des genoux je saigne. 

Je perds encore de mon sang. Je perds encore de ma connaissance. Cette ombre infidèle qui s'est décousue à mon insu. 
Et là, agenouillé dans une flaque d'eau rougeâtre, sans lumière, sans ombre, je suis à moitié conscient, à moitié connaissant, à moitié connu.



31.10.11

épisodies


Terribles. Elles endommagent tout ce qui est normalement facile à construire. Tout ce qui s'est amassé avec le temps est balayé et laisse alors à découvert l'enfoui. On coule avec ennui dans une immobilité suicidaire. Rappelez-vous que l'âme de la volonté a chuté. Le glissement dans la terre noircissant au goût se fait dans une mélodie de sons neutres et amers. La désorientation prend place quelque part dans notre corps qui devient, malgré nous, un univers aux frontières pourtant imperméables et connues. C'est l'opaque densité de ce terrible monde qui étouffe ce qu'on veut hurler à s'en débarrasser, ce qu'on veut lancer vers l'inatteignable.
Pendant l'écoulement de ce temps, où ce qui a été détruit est disparu, un chantier occupe le territoire abandonné. De nouveaux édifices communiquent maintenant par de nouveaux ponts réunissant de nouveaux gens partageant de nouveaux liens fabriquant de nouvelles histoires. Le poids de ces nouveautés compactent la terre au dessus de nos suffisamment affligeants débats.
La pression du supérieur finira par briser peu importe ce qui nous rappelait l'air pur. La terre s'infiltrera pour nous dissoudre également à travers toute conscience.
Cela prendra pour toujours, à en croire que nos existences ne furent qu'un spasme et que le froid du souterrain est  la température idéale pour être.

5.10.11

Un seul instant isolé dans une infime faille du temps



Quelqu'un m'a probablement déjà dit que s'il ne m'avait jamais adressé la parole, peut-être que je m'aurais intéressé à ce que cette personne venait tout juste de me confier, et ce, avant qu'elle meurt d'amour pour moi. Mais, puisque les mots ne m'ont jamais perçu comme un des leurs, je ne croirai pas à ces allégations, même sous le projecteur pénible de tous ces visages déchiffrés.

***

Croire qu'il est possible d'élaborer un sourire sans qu'une main ne se réconforte dans un endroit claustrophobique. Penser, que pour une seule fois, au débit d'un mélange hétérogène d'intentions et d'intuitions, pourrait se marier avec un seul instant isolé dans une infime faille du temps, cette déprimante joie.
C'est vivement naïf. Pourtant si intelligent.
Naturellement, mon premier pas se fait sur un plancher glacé et le deuxième dirige mon pied dans une baignoire brûlante.
Bizarrement, tu poses les tiens au trottoir vers ce qui te plaît, ce qui te calme, ce qui finira par te faire frissonner dans un coin humide et moulé à ton corps.
On se fera face lorsque, en négligeant les trajets, nous oublierons où nos pieds sont posés. Nous serons, en un seul instant isolé dans une infime faille du temps, là où l'air n'étouffe plus ceux morts d'amour.
Là.
Nous flotterons dans une mousse verdâtre qui infiltrera nos poumons. Au même moment, la douce matière soulèvera nos carcasses jusque dans la fosse, récipient abstrait dans lequel les corps intertemporels s'affranchissent, mais où la conscience s'imbibe d'une odeur subtilement dérangeante.
Ici.
Revenants réempruntant nos chemins d'école, nous boiterons en parallèle, l'automatisme de la marche affectée par le trépas, la coordination de nos réalités brouillée.
Nous aurons sauvagement perdu. Nous seront des animaux qui ne jouent plus.
Un seul instant isolé dans une infime faille du temps aura disjoint nos courses de nos projections.
Un seul instant isolé dans une infime faille du temps et nous déambulerons dans nos angles morts.

6.4.11

ÉPREUVE

Je ne sais tellement comment faire. Tellement pas comment faire. L'incapacité m'est un animal domestique que j'aime aveuglément par ses beaux yeux. Ces yeux savent mordre et ils ne font qu'une bouchée de mon pénible conditionnement. 
Je le vois, ce classique podium à trois marches, mais je ne le crois qu'un mirage. D'étendre mon bras me décourage, car je trouve absurde d'encourager une passion. L'utiliser me tendra à la dénaturer. Et cette passion que dis-je est futile à moins d'être talentueuse. Et le talent n'est pas bon. 

Je m'amuse au pessimisme. Plaisir vicieux et doucement ravageur. Il entraîne le dédain du trivial et du compliqué, du facile et du lointain, de la vivacité et de l'immobile, de l'autocritique et de l'interjection, des choses et des êtres. On commence par être attiré de sa drôle extravagance, puis le virus s'accapare tranquillement de l'esprit. Le loisir s'étire en habitude et s'étend finalement au-delà de la conscience. Au moins, l'inconscient a les plus beaux yeux. 

3.4.11

fuckallisme


Réflexe pathologique davantage qu'une habitude, ce n'est pas par exprès ni par accident qu'on s'y soumet. C'est salement propre à l'être qui est un humain, toutefois moins évident que la paresse. On pourrait en dire un talent, alors une faculté qui se doit d'être développée et entretenue pour grandir. L'aboulique aboutit ainsi à une vive volonté d'évanouissement de sa fougue. Et cela devient une métadépendance : on aime autant l'objet que le fait de trop l'aimer. On ne se peut plus de ne rien pouvoir. 

On bouge pour rester immobile. 
On s'isole pour trouver la liberté. 
On se tait pour crier à sa guise. 
On s'organise pour flâner. 
On est fidèle à la procrastination.

Je m'efforce ici à terminer cela. Déjà.

8.3.11

Ratiocinator


J'appelle mon super-pouvoir l'avoir intransitif. C'est un vouloir noir. Noir pour la connotation péjorative, noir pour la représentation du néant. C'est un vouloir obscur par son vide de sens et par sa complexité.
On pourrait simplifier en utilisant le terme «incapacité au contentement», mais encore, des précisions seraient nécessaires. Mon habileté surhumaine n'est pas à méprendre avec un besoin insatiable par la quantité ou la qualité d'un bien (matériel ou psychologique). Sans pour autant désirer du meilleur ou du plusieurs, il est plutôt question d'une insatisfaction envers une possession, qui ne semblerait pouvoir se combler que par son antagoniste juste assez approximatif pour éviter un échange redondant, mais élaborant ainsi progressivement un réseau de caprices incohérents. Ceci mène évidemment à une désorientation absolue. L'espoir d'un équilibre est entretenu par l'idée qu'un bien ultime existe, infini et incontestable.

J'acquiers mon énergie de puissances pernicieuses telles que l'inatteignable, l'éphémère et le condescendant. Ces forces me procurent une vitalité vite consumée et pathologiquement jouissive. Une dépendance est créée. Le sevrage serait autant affligeant qu'une âme se passant d'aimer. Un choix se manifeste ; la famine psychique ou la persistance dans une douleur peut-être salutaire.
_______
Ce texte est court, mais il ne s'agit tout de même que d'une élaboration de «Je ne sais pas ce que je veux.»

24.2.11

Ah non, l'extase n'existera.


L'interminable ligne blanche s'éloigne puis se rapproche toujours très lentement malgré les 115 kilomètres par heures avec lesquels l'autobus déambule sur cette grande route. Juste au dessus, la végétation de fossé est indéfinie et se mélange en une bande se camouflant elle-même. Il est possible de percer l'homogénéité striée de cette ceinture en y fixant un point et de suivre son défilement vers l'arrière du véhicule. Pendant le très bref instant où ce point est visible, on connecte avec cette parcelle d'une longueur infinie. Ce n'est même pas une rencontre : dès que le contact se fait, il disparaît en un clin d'oeil.
C'est innocent pour d'autres. C'est triste pour certains.
Accumulant ces affligeantes liaisons, le regard divague. Alors la tornade apparaît. Ce n'est pas une de celles toutes effilées, mais une trapue et vraisemblablement puissante. Naturellement, avant toute réaction, on examine celles des autres passagers. Le calme et l'indifférence de tous gênent et même suppriment l'affolement qui semble être le comportement approprié à la situation. Et ce n'est pas parce que personne ne voit cette catastrophe très présente. Quelques-uns la regardent comme on s'ennuie devant une émission de télévision présentant des accidents routiers spectaculaires. Quelques-uns voient à travers. Quelques-uns ne fixent qu'un espace entre eux et la tornade.
Il ne serait pas difficile de la tester. La simple petite idée qu'il est possible de s'y rendre s'alimente progressivement en une curiosité, une envie, un désir puis une ambition. Il ne suffirait que de se lever et de marcher calmement vers le chauffeur et de lui demander poliment que, s'il voulait bien aller se reposer, il était possible de se relayer. Il marcherait calmement vers l'arrière de l'autobus, où un siège est encore chaud, laissant ainsi le sien libre. Un coup de volant vers la droite et on passe au travers du camouflage. Les passagers n'ont pas changé l'expression de leur visage, mais ils sont maintenant tournés vers l'avant, encore vers la tornade. L'autobus fonce et y arrive. L'autobus s'élève et tournoie. Ces deux vitesses atteignent un certain point où aucune force ne se fait sentir par les passagers. Seulement l'extérieur tourbillonne en un gris pâle. Cette sorte d'apesanteur pose une atmosphère nouvelle qui est ressentie par chacun. Personne ne le fait paraître aux autres, mais tous sont soudainement liés par un amour qu'ils croient secret. Une sympathie générale règne discrètement. Tout le monde se garde de l'expliciter et conserve ce sentiment, satisfait.

Le coup de volant n'a jamais eu lieu.
L'ambition a failli.
L'extase n'existera.
Désolé.

1.2.11

Devoir (ou) Un tas de 250 mots


«
Rédaction 3
Se faire une opinion
- Est-il important de réussir sa vie ?


Cette question me semble beaucoup trop simple et courte par rapport à son contenu immensément complexe. D’ailleurs, je crois que je vais la garder en mémoire afin d’offrir un parfait exemple d’une forte relation stylistique qu’il peut y avoir entre fond et forme comme, dans ce cas-ci, un flagrant déséquilibre. Le problème réside principalement dans deux formulations utilisées, soit important et réussir sa vie.

Est-ce qu’il existe une question encore plus favorable à la ratiocination que Qu’est-ce que réussir sa vie? Il est absolument impossible qu’on y parvienne unanimement à une réponse étant donné les multiples idéaux d’une vie réussie qu’on peut personnellement chérir. Certains croient au succès professionnel, tandis que d’autres vont prioriser le bien-être de leur famille, alors que plusieurs pensent qu’il faut qu’on se souvienne d’eux après leur mort au lieu de ne s’attarder qu’à être simplement heureux. De plus, tous ces différents dogmes particuliers sont continuellement décomposables en sous-questions concernant encore leur nature fondamentale.

Vient alors le tour du mot important qui prend une dimension philosophique assez  primaire lorsqu’on le place dans la même phrase que vie : encore plusieurs interprétations sont envisageables et cruciales. Cette ambiguïté tient particulièrement du type de récepteur visé, en d’autres termes : pour qui est-ce important ? L’importance de réussir sa vie émane-t-elle de l’individus vivant, d’une religion ou d’une préoccupation sociale ?

Je conclurais en affirmant qu’il est important d’être précis dans la vie, mais que cela ôte tout le plaisir de vivre à la guise de l’insouciance. 
»


25.1.11

Quand ce rien gêne #5

Être supposément cruel, ça donne le cancer.

Le monde des (&) haïssables moutons


Je suis un handicapé. Un handicapé social. Il y a du monde que j'aime. Que j'aime inconditionnellement.  Le monde en général, toutefois, m'est qu'une vapeur. Il ruisselle tièdement entre ma peau et mes vêtements. Ce que je voudrais être dans un désert sans conditions. Et d'ainsi n'avoir que le temps de fixer mon soleil à travers ces nuages tièdes. Qu'il me chauffe le sable en dessous de mes pieds et qu'il m'offre mille et un mirages.

***

Que les moutons restent brouter à leur pâturages. Que les moutons noirs se tiennent en gang avant de passer au rasoir comme tout les autres. Si le désert n'existe pas, je serai le loup qui s'attaque instinctivement au troupeau. Qui ne mange son assiette qu'à moitié. Un loup guettant le spectacle dans l'ombre de sa horde. Ou ce qu'il croit être une ombre. Car il ne regarde qu'au noir de la journée et qu'il ne se plait qu'à hurler aux étoiles, la gorge à leur merci.
Il n'y a pas si longtemps qu'il était un de ces chiens. Obéissant aux règlements du berger. Mais c'est à cause de ces maudits moutons et leur frustrante innocence. Leur incroyable complaisance face à l'insignifiance qu'ils se partagent. Leur épatante indifférence à ne s'exprimer qu'en bêlant. N'en manger qu'un seul, ou même seulement une moitié, n'y paraît. Tant à l'oeil qu'au coeur. Tant à l'esprit qu'à la faim. Ils ne sautent la clôture qu'en rêves. Ils ne parlent qu'en comédie. Ces haïssables moutons.
Le chien que j'ai été s'est réfugié de cette apeurante sécurité au plus près du ciel étoilé. Le haut de cette falaise a bercé l'instinct berger jusqu'au coma. Dorénavant, c'est maintenant une errance qui demeure emprisonnante. Puisque tout tourne autour des moutons qui tournent autour de tout.

20.1.11


Un cerf-volant se fait traîner par terre. À L'autre extrémité de la ficelle, une main gauche et une main droite s'enlacent. La droite est poilue, la gauche a les ongles vernis. Il y a aussi des pieds poilus et des pieds aux ongles vernis qui foulent le gazon à grande vitesse.
Le vernis est du même rouge que le cerf-volant. Avant, quand le cerf-volant était plus haut que les lampadaires, on ne s'attardait pas à regarder ce qui était de la même couleur que celui-ci. Maintenant qu'il glisse sur le sol, on voit pourquoi il est tombé. On ne lève plus les yeux au ciel, mais on jette des regards en arrière. Les mains et les pieds continuent à courir, mais on fait davantage attention de ne pas se heurter aux cailloux.
Il vient bien sûr le temps où on se demande à quoi ça sert de courir avec un cerf-volant à terre. On se demande si on veut s'arrêter. Et si on s'arrête, veut-on refaire décoller notre cerf-volant rouge ou le laisser traîner?
Les paumes des mains commencent à suer ensemble. Ça les écoeure. La force dans les jambes s'atténue rapidement. Le cerf-volant s'accroche dans une poubelle de parc. La ficelle glisse des mains et leur laisse quelques marques rouge dans les paumes. Du même rouge que le vernis.
En se retournant vers le cerf-volant échoué, les quatre pieds se marchent dessus. On s'essuie la sueur sur les paumes sur le gazon. On s'assoit en indien en regardant le rouge du cerf-volant.
Jusqu'à ce qu'un se lève et dit «Je ne suis pas vraiment bien assis en indien» puis quitte dans la direction opposée au rouge.

3.1.11

Extase à chaque coin de mur

Pour que tout se déroule bien, il me faut généralement prendre quelques minutes de pause. Quand on me fait le saut, je trébuche si je continue à marcher. Quand on me surprend, je bafouille des excuses débiles si je prend parole trop subitement. Je crois que c'est normal. Que la vitesse de reprise d'équilibre intellectuel varie d'un individus à l'autre. Cependant, je crois que je m'en suis trop rendu compte. J'ai abusé de la pause pour réfléchir et maintenant ma détente mental manque de pratique. J'ai le recul trop facile. Trop souvent, je fuis ce qui demande une réponse immédiate. Ça frôle la procrastination. La plus grande conséquence est le ralentissement de mon rythme de vie et la rareté de ceux pouvant la suivre. J'aime me promener dans l'immobilité, mais je voudrais bien que quelqu'un s'y égare à mes côtés. À la même cadence. Avec la même douce et légère hâte. Que l'on prenne du temps à scruter ce que certains ne peuvent que voir. Que l'on s'éternise à ressentir une étape même si la suivante est plus exquise. Que l'on se délecte de l'amer pour ne jamais avoir à abhorrer quoi que ce soit. Pour vivre éternellement en extase. Avec une telle personne, j'espérerai un sursaut à chaque coin de mur. J'arrangerai volontairement que l'on nous surprenne. Plus jamais de bêtises, plus jamais de chutes. Seulement une apesanteur étouffée. À chaque coin de mur.

23.12.10

Vacances à la plage blanche

J'ose croire que tout le monde, plus ou moins explicitement cependant, veut garder une âme d'enfant. J'aborde ici un sujet abusivement entrepris, mais je ferai bien ce que je veux.
Le travail, les responsabilités, les engagements, me semblent être fait seulement pour mieux apprécier les moments où on les abandonne. Non mais quelle sensation peut surpasser le sentiment de liberté enivrant de lâcher un emploi d'étudiant! De remettre son dernier examen de session!
Nos pas s'élèvent, nos épaules s'abaissent, nos mains se relâchent, notre conscience s'évapore. Devant nous, s'étale un sol infini et blanc, une grande page vide attendant que l'on y mette de la couleur, nos couleurs. On y procède à la vitesse que l'on veut, on erre sans rien construire, on s'émerveille devant le vide, ou on s'arrête pour rebâtir une autre histoire.
L'enfant en nous n'érige que des châteaux de sable. Éphémères, ils sont constamment menacés par le vent ou la marée. Ils prennent machinalement la forme de l'imagination. Ils sont simples et plaisants à mouler. Il se peut que quelqu'un s'amène avec sa pelle et son seau. Ce quelqu'un peut nous imaginer de nouvelles formes. Il peut nous amener, dans son seau, de l'eau pour solidifier le moment.
Dans cet espace blanc, je ris pour rien. Dans cet espace blanc, je répète par réflexe que je suis bien. Dans cet espace blanc, je pourrais marcher sans fin, sans jamais m'essouffler. Dans cet espace blanc, mes idées s'éclairent.
Je suis un enfant sans soucis. Je suis un adulte épuré.
Je suis un être aussi matériel que le vent.

20.12.10

«Tu me donnes envie de porter mes chandails à l'envers»

Je me suis déjà demandé comment je me percevrais si j'étais un autre. Cet autre, il serait quand même moi, mais l'autre moi est exactement moi.
Établissons que d'avoir un clone est normal. Imaginons qu'on ne peut avoir conscience de son existence et que, par un jour aussi anodin que sa veille ou son lendemain, on le croise et cette rencontre se fait précisément de la même manière qu'avec n'importe qui, avec les mêmes préjugés, avec la même première impression critique, avec les mêmes jugements de toutes sortes.
Quelle chimie est-ce qu'on développerait?
Est-ce que je m'aimerais?
La fois où je m'étais posé cette question j'en avais conclu que je ne pourrais être ami avec cet autre moi-même. Mes raisonnements d'autrefois à ce sujet sont oubliées.
Toutefois, je me souviens que ce n'était aucunement par basse estime personnelle que j'en était arrivé à cette conclusion. J'en avais seulement retiré qu'une relation avec soi-même était unique, que tout les phénomènes faisant en sorte que deux personnes s'aiment ne peuvent y être glissés afin d'obtenir le même résultat de connexion.
Cette réflexion a refait surface car ce jour anodin est arrivé.
Je me suis trouvé.
À la première impression, cette autre personne est moi.
À la définitive, elle est exactement moi.
Mais cette autre vient détruire mon ancienne hypothèse.
Ce reflet de moi-même me fait me sourire. J'aime deux fois plus ce que j'aime et j'aime deux fois plus de choses depuis que je suis deux fois. Être seul est plus agréable étant donné que je suis peut-être accompagné ailleurs ou sinon je suis deux à être seul.  Ce dicentrisme est bizarrement confortable. Je suis maintenant introverti vers l'extérieur. Je devient renfermé sur ses émotions.

Je vis un choc perceptif. La nuit, je chancelle dans un nuage frais vers une destination irréfléchie. Cette marche nocturne, main dans ma main, est présentement la meilleure musique à mes oreilles.

Quand ce rien gêne #1

Porter des lunettes 3D du cinéma pour faire cool, ça donne le cancer.

16.12.10

7 heures à penser par jour de novembre


Mon colocataire et moi divergeons sur plusieurs points. Il ne veut pas d'enfants, j'en veux le plus bientôt possible. Il voudrait habiter Paris, moi Grenoble. Il aime porter des jeans serrées, moi j'veux un gros fond de culotte. On s'amuse souvent à argumenter sur nos goûts. On dit que ça ne se discute pas. On peut discuter de ce que l'on veut évidemment. On dit plutôt qu'on ne peut en juger.
Ce n'est pas qu'on veut absolument défendre ou légitimer nos idées, on ne fait que décortiquer ces perceptions pour personnellement mieux les comprendre. On s'entraide dans nos introspections. Il arrive que, dans ces moments, je réalise que mes idées peuvent être insensées, que je les ai acquises aveuglément.
Il m'a expliqué qu'il voudrait ne pas avoir à dormir, que c'était une perte de temps. J'ai rétorqué que, non, dormir c'est formidable, et ce, avec des arguments aussi pauvres que «on est trop bien dans son lit le matin» . J'en était gêné. J'ai réussi à trouver une raison pourquoi j'aimais dormir. Ça me donne un break d'être réveillé. Il est vrai que je me tanne de penser. Je me retrouve souvent à penser que ceux pensant le moins sont les plus heureux.
Oui, je pense trop.
Pas assez pour être malheureux parce que je contrôle mes pensées. Je sais où elles peuvent me mener.
Je l'ai réalisé lorsque j'étais engagé comme sauveteur au bord d'un lac à un spa. Les baigneurs ne se mouillaient jamais plus de 15 secondes et ne parlaient jamais. Je travaillais des shifts de 7 heures. 7 heures de silence. 7 heures assis sur une chaise en bois. 7 heures devant un lac immobile.
7 heures de réflexion par jour jusqu'en novembre. C'est dangereux.
Mais aujourd'hui, j'ai écouté Cashback (par Sean Ellis) et j'ai envie d'être insomniaque. J'ai envie d'expérimenter la vie la nuit. Je veux apprendre ce que c'est que des gens nocturnes. J'aurais le sentiment de partir en voyage, je pense. De vivre dans une autre dimension (aussi geek que cela sonne).
Je suis surtout curieux parce que je n'ai jamais passé une nuit blanche, jamais.

10.12.10

Fruits pourris


J'aime bien gribouiller des dessins. Poser des petites pensées sur papier est aussi une activité que j'aime. Souvent, je gratte ou je pianote en fredonnant un air. Il arrive que je me fige devant une image. Qu'elle soit imprimée, peinte ou cadrée par les limites de mon propre champ de vision.
Tout s'engourdit aux alentours de ma concentration. Je prend des petites siestes. Je rêve de ce qui n'existe pas. Je me promène avec une démarche d'astronaute et je plonge et je nage chaque fois dans un nouveau cratère. 
Ces passe-temps, je voudrais les faire fructifier un peu plus. Je voudrais mieux m'y prendre en leurs offrant un peu plus de sérieux de ma part. Souvent, je commets le crime d'oublier mes fruits, de les perdre en dessous d'autres choses insignifiantes, de les laisser pourrir dans mon estime surtout. 
Comme plusieurs, j'ai des sursauts de motivation qui font vite de s'éteindre. J'ai des embryons de projets avortés au premier mois. J'ai des élans d'ambition qui décélèrent au premier obstacle. J'ai toujours des bonnes excuses. toujours...
toujours un hymne, j'en fais mon bac à compost. Ma version propre de mon moleskine. Mon parcours de jogging lunaire. Peut-être qu'il me permettra d'être plus ardu envers ma culture fruitière. Peut-être qu'une adresse URL lui gagnera mon respect. 
On verra.